Un suppositoire et hop, on s’envoie en l’air !

Publié le par Kayak Meaux

Un truc culte, vraiment culte dans le monde du kayak de rivière sportive... un truc avec la forme d'un suppositoire géant... un truc pour s'envoyer de grosses chutes... Le TOPO !!!


Début 80, le petit monde de la haute rivière est en ébullition. Les premières se multiplient, ça navigue aux quatre coins du monde sur tout ce qui a de l'eau, torrents caillouteux, fleuves tumultueux, chutes de plus en plus hautes... Mais à l'époque, les bateaux font 4m ou plus, effilés et souvent en fibre de verre... Cela nous parait étrange maintenant mais nos aïeux se bouffaient des rivières alpestres de classe V avec des Dancer ! Et là on leur doit un respect sans bornes. Slalomer entre les rochers sans se prendre en cravate, taper un obstacle sans coincer sa pointe toute fine, sauter une chute sans encastrer son missile dans le fond de la rivière, passer un rouleau avec la technique du sous-marin, passer un seuil sans pouvoir faire une giclée, le tout dans des bateaux pouvant littéralement exploser sous impact d'un rocher ou se plier en deux comme une feuille... faut être très bon, méchamment couillu,  voir totalement inconscient ! On ne parle même pas de l'aspect ludique, hormis des vagues type Hawaï point d'amusement...


Début 80, la pratique du kayak polo se structure progressivement, les clubs s'y mettent (Meaux n'est d'ailleurs pas en reste) et l'on voit apparaitre des bateaux spécifiques à la discipline. Ils sont plus courts et arrondis aux extrémités. Certains intrépides se lancent en rivière avec ce genre de bateau et en customisent les formes.


C'est dans ce contexte que Holger Machatscheck de l'AKC (Alpiner Kayak Club) met au point avec le fabriquant Eskimo un bateau, le fameux TOPOLINO. Il est plus court, très court pour l'époque : 2,20m, tout rond ce qui évite les coincements de pointes et augmente la tolérance des gîtes. Sa faible longueur et son plastique très solide lui évitent de se plier en deux en cas de cravate. Ceci est une révolution notable, car jusqu'alors de nombreux kayakistes quittaient précipitamment leur bateau de peur de s'enrouler autour d'une pierre et d'y rester coincer. L'appréhension diminuant, les limites de navigations sont repoussées. Ainsi sa petite taille lui permet d'aller sur des terrains de jeux jusqu'alors interdit sous peine de cravate.


L'autre avantage majeur de cette petite taille est de maitriser les sauts. Avant, lors d'un passage de seuil ou d'une chute, la technique consistait à prendre de la vitesse, lever la pagaie au dessus de la tête et attendre que la gravité fasse sont office avec visite des fonds marins si l'on ne tombait pas la tête la première. Le Topo permit de développer une nouvelle technique : la giclée. En maitrisant l'impulsion on pouvait partir et tomber plus à plat, maitriser plus ou moins la réception et tomber dans des bassins moins profonds. Si l'on rajoute à cela que le Topolino est facile à transporter, permet de surfer de petite vague ou d'aller jouer dans de petits mouvements d'eau... Mais malgré tout son volume lui permet toujours d'affronter de gros torrents et il est suffisamment spacieux pour accueillir confortablement de grands gabarits (sans excès toutefois)... Que demande le peuple !!! le Topo a rapidement envahi les torrents du monde entier !


Par contre, il existe des inconvénients à cette forme de galet, une glisse quasi inexistante, des accélérations pifomètriques, une réelle volonté à vouloir tourner rendant la tenue de trajectoires très aléatoires, des accroches de stops en drifts et un équipement pléthorique pour l'époque, minimaliste aujourd'hui...


Le Topolino a ouvert les voies des Creeks modernes et des Playboats . Beaucoup de bateaux s'en sont inspirés voir totalement copiés, les kayaks actuels cherchent souvent à en garder l'esprit en ajoutant volume, quarts, fonds plats... mais le Topolino à prés de 30 ans, des rassemblements de fondus existent encore, Eskimo cherche toujours à faire évoluer la forme d'origine avec un News Topo en 2003 et un proto actuellement en cours de développement (New Salto)... l'apparition en 88 d'un kayak double sous le noms de Topoduo (il y en a un au club), seul K2 de rivière du marché.... En bref, le Topo n'est pas mort et son fantôme hantera encore longtemps bon nombre de rivières.


Publié dans Culture Kayak

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